« Et toi, as-tu déjà été harcelé pendant ta scolarité ? » C’est en constatant qu’à cette question on me répondait systématiquement « oui » que j’ai voulu savoir depuis quand c’était normal et comment transformer le harcèlement systémique en comportement rarissime. Un chatbot pour lutter contre le harcèlement scolaire ? La drôle d’idée n’est pas si bête. Explications.
Ce ne sont que des taquineries… Ça existe depuis toujours… Ça forge le caractère… C’est pas grave… Pas grave ? Je crois qu’on n’a pas bien compris la signification du mot « grave ». Alors oui, la seule chose vraiment grave est la mort… ça tombe bien puisque le harcèlement scolaire tue, c’est donc grave. Et s’il ne tue pas dans les mois qui suivent, il va miner, ronger, détruire, de façon insidieuse, jusqu’à abîmer la lignée par des comportements hérités, de générations en générations.
« On a tous connu du harcèlement »
C’est vrai, mais ne serait-ce pas la meilleure des raisons pour lutter contre ces habitudes assassines ? C’est justement parce que le harcèlement scolaire a toujours existé qu’il faut absolument le bouter hors des cours de récré et des réseaux (a)sociaux. Car en plus de ne pas être sorti du chapeau en 2023, le harcèlement scolaire a pris du poids grâce à Facebook, Instagram, TikTok, Discord, Snapchat et j’en passe. Le harcèlement scolaire tire à l’aveugle et en continu.
“Les obstacles paraissent d’autant plus insurmontables que l’on est petit”.
Il a quel âge, le harcèlement scolaire ?
Il n’est pas tout jeune. Il s’appelle ainsi depuis les années 70. La première définition nous vient de deux psychologues scandinaves. Aujourd’hui, tout le monde s’accorde à définir une victime du phénomène comme un élève soumis de façon répétée et à long terme, à des comportements agressifs visant à lui porter préjudice, le blesser ou le mettre en difficulté de la part d’un ou plusieurs élèves. Il s’agit d’une situation intentionnellement agressive, induisant une relation d’asservissement psychologique, qui se répète régulièrement.
Et si en parler à un robot était la solution?
Le robot en question c’est Cathy. Ce chatbot est un peu le Jiminy cricket du harcelé, du témoin, de l’enseignant, du parent. Lydie Catalano, ancienne enseignante, ancienne harcelée, est la co-fondatrice de la start-up IA Medical (lien), qui s’appuie sur l’IA et le ChatGPT pour développer des outils médicaux. Elle a développé Cathy, pour accompagner les victimes de harcèlement scolaire. « Nous nous sommes aperçu que les gens étaient plus cash en discutant avec une machine. Cathy est né de ma collaboration avec Catherine Verdier, psychologue, psychothérapeute et analyste spécialisée dans le travail avec les enfants et les adolescents ». Et tant qu’il y aura des drames dans les établissements scolaires, ça veut dire que tout n’est pas ok, « tant que le problème n’est pas réglé, nous aurons besoin de développer encore plus d’outils. Car il faut bien se rendre compte que la destruction n’opère pas qu’enfant, un harcelé adulte sera plus facilement une proie à son travail s’il l’a été dans sa jeunesse ».
En un mot comme en cent : la sensibilité d’un enfant harcelé est flinguée, à vie».
L'intelligence artificielle au secours de la bêtise
Pourquoi c’est révolutionnaire? Parce que Cathy est un outil issu de l’IA qui va délivrer du contenu personnalisé en plus des numéros d’urgence, vidéos, livres, groupes de paroles en ligne, indicateur de bien-être de l’enfant, selon les besoins de l’utilisateur qui sont détectés grâce à une intelligence artificielle basée sur un système de questions-réponses. Et que les plus réticents se rassurent, « aucune donnée personnelle n’est demandée. L’idée étant de libérer la parole et que personne ne se sente culpabilisé », insiste Lydie.
Que dit la loi ?
Elle dit plein de choses, encore faut-il qu’elle soit connue pour être crainte. Alors les p’tits loups, sachez que depuis le 4 août 2014, la loi pour l’égalité « réelle » (j’aime bien la précision) entre les femmes et les hommes, introduit un nouvel article 222-33-2-2 dans le code pénal libellé comme suit : « Le fait de harceler une personne par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende« . Fin de la blague, non?
Pour enfoncer le clou de l'empathie...
Et comme aucun gamin ne devrait subir une injustice aussi minable qu’est le harcèlement scolaire, voici quelques pistes en plus du chatbot Cathy pour faire la nique à tous les lâches de la terre.
Livre : « Plus jamais harcelés » de Saverio Tomasella aux éditions Vuibert : L’auteur dit en préface que « le harcèlement est une maladie sociale : nous sommes tous concernés. Il est nécessaire de trouver le courage d’entendre et d’affirmer la vérité sur cette réalité extrêmement grave, à laquelle les nouveaux moyens de communication offrent une redoutable possibilité d’expansion sans limite ».
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